2018.01.29 – Arrivée au LiPhy

Installation dans le labo

Installation et étalonnage du matériel qui servira aux expériences.

Philippe a déjà réalisé quelques essais de moulages en silicone. Les “oeufs” sont réalisés grâce à un moule qui peut être imprimé en 3D (5h d’impression). Chaque demi-sphère nécessite 2 moules, l’un positif, l’autre négatif. Les deux demi-sphères sont ensuite assemblées grâce à du silicone.

Philippe a aussi réalisé quelques essais en teintant de petites billes de silicone.

Test des haut-parleurs vibreurs

Nous soudons un premier vibreur de téléphone pour constater sa puissance de vibration. Posé sur un objet, le vibreur fonctionne comme un haut-parleur.

Test de mise en vibration des oeufs

On place un excitateur sous l’oeuf pondu par Philippe pour observer sa mise en vibration. Il sera indispensable de rendre l’excitateur et l’objet solidaires pour enregistrer un signal valable.

Apprentissage de l’utilisation de l’oscilloscope ainsi que du générateur de fonctions

2018.01.30 – Prendre ses marques

Création d’un outil de documentation en ligne

Installation d’un blog WordPress pour le journal des résidences :  c’est le site que vous lisez actuellement

Test de mise en vibration d’un ballon de baudruche géant

En plaquant un haut-parleur vibreur sur le côté du ballon, et en envoyant des signaux audio, on obtient le signal audio réverbéré.

Résonances d’un signal test (canal de droite / spectrogramme du bas) dans un ballon de baudruche, grâce à un haut-parleur vibreur (canal de gauche / spectrogramme du haut). On visualise et entend bien les diverses harmoniques générées par le dispositif.

Création d’un patch logiciel Pure Data de génération de signaux de test  

Après avoir expérimenté la production et la captation de signaux rampants (sweeps) avec l’oscilloscope et le générateur de fonctions de laboratoire, nous décidons de créer un générateur de fonction plus simple et plus adapté à un contexte de création musicale.

On détourne un patch d’aide de Pure Data qui permet de moduler un oscillateur autour d’une fréquence centrale, selon plusieurs presets ou de manière libre.

Générateur de rampes (Pure Data)

2018.01.31 – Comprendre la vessie natatoire

Compréhension de la vessie natatoire

Le matin, nous récupérons à la poissonnerie des Halles de Grenoble, des morceaux de merlu / colin sur lesquels pourraient se trouver des vessies natatoires. 

Le poisson possède en effet une vessie natatoire mais celle ci est solidaire des vertèbres. Nous observons chez le merlu la présence d’un autre tissu plus cartilagineux qui semble supporter la membrane fine de la vessie : celle-ci est en effet constituée par un  tissu fragile qui se déchire très facilement lorsque l’on supprime le support cartilagineux.

Cette poche d’air ne ressemblant pas à ce que nous avions pu imaginer, nous recherchons si il existe différentes formes de vessies, en lisant notamment un texte sur l’évolution des vessies.

Nous regardons également si d’autres espèces de poissons pourraient avoir une vessie moins fragile. Parmi elles la truite, la carpe koï, la perche, le gardon, l’ablette… et oui, Les carpes aussi ont une vessie.

De nouvelles données sur le rôle de la vessie natatoire

En cherchant des techniques de dissection, Térence découvre l’importance de la fréquence de résonance de la vessie natatoire sur l’audition des poissons. Cette poche résonnerait et permettrait l’amplification des sons correspondant à sa fréquence de résonance.

Citation : Schulz-Mirbach T, Metscher B, Ladich F (2012) Relationship between Swim Bladder Morphology and Hearing Abilities–A Case Study on Asian and African Cichlids. PLoS ONE 7(8): e42292. doi:10.1371/journal.pone.0042292

journal.pone.0042292

2018.02.01 – Mise en vibration d’un ballon

Mise en vibration d’un ballon de baudruche

Nous modélisons la vibration de la vessie natatoire par un ballon. Nous utilisons des gants de laboratoire pour obtenir une poche d’air suffisamment fine. 

L’immersion du ballon est rendue possible grâce à un fil de nylon fixé sur une ventouse. Celle-ci peut ainsi être positionnée sur le fond de l’aquarium.

Le fil de nylon peut ainsi permettre la création d’une double poche, comme observé sur les vessies décrites sur internet.

L’excitateur est lui aussi étanchéifié grâce à un gant de laboratoire. L’enregistrement des sons produits se fait avec un micro-contact (piezo), branché sur une carte son. Ce système permet de faire vibrer le ballon et d’enregistrer le résultat sonore émis par le ballon. 

De cet enregistrement est issu un audiogramme figurant le signal témoin (en bas / canal droite du fichier audio) et le signal résultant (en haut / canal gauche du fichier audio).

On constate la création d’harmoniques qui pourraient être issues de la vibration du ballon mais aussi d’une vibration parasite de l’excitateur.

Nous reproduisons le test sans le ballon et observons en effet que les harmoniques subsistent. Il semblerait que ce soit la vibration du gant isolant l’excitateur qui produise ce bruit parasite. Il apparait donc nécessaire de revoir la technique d’étanchéité de l’excitateur.

2018.02.02 – Échanges

Étanchéification d’un haut-parleur

Nous nous attelons au problème des haut-parleurs étanches. L’excitateur utilisé est en partie en papier. D’après Patrice, technicien au LiPhy, nous pourrions juste l’isoler avec une fine couche de silicone mais cette solution ne sera pas pérenne. Les vibrateurs de téléphones sont plus petits et scellés par des machines. Les jointures sont donc très petites et ne permettent pas à l’eau d’entrer.  D’après Maxime, Post-doctorant au LiPhy, une simple gaine thermo-rétractable permet d’isoler l’électronique de l’eau.

Nous réalisons donc un système de ce type, recouvert d’un ballon de baudruche permettant de plonger librement les fils électriques dans l’eau.

Nous avons aussi fait des recherches sur les haut-parleurs/transducteurs immersibles. Cela existe pour les piscines, et une version DIY est montrée sur le site instructables. En isolant l’arrière du caisson nous pourrions avoir un système pouvant résister à l’eau…

Rencontre avec Nathalie Henrich

Nous rencontrons pour la première fois Nathalie, directrice du département Parole et Cognition au Gipsa Lab. Nous discutons plus particulièrement de l’anatomie de la vessie natatoire, encore mal comprise dans le projet. Une compréhension du matériau, de sa structure et des caractéristiques biomécaniques du muscle sonique apparait nécessaire pour espérer créer une vessie biomimétique capable de reproduire le chant des poissons. De son côté, le Gipsa Lab travaille à la conception et à la fabrication de tissus en collagène produits par impression 3D. Une telle technique pourrait nous permettre d’obtenir des matériaux très fins (de l’ordre du millimètre), ayant des propriétés mécaniques spécifiques. Le Gipsa Lab travaille actuellement avec un pôle d’impression 3D de l’université de Grenoble : la plateforme Gi-Nova. Nous évoquons également des pistes de restitution possibles de ce projet : un concert immersif dans une piscine ?

Échange avec Éric Parmentier

Nous avons précédemment contacté M. Parmentier, directeur du laboratoire de Morphologie Fonctionnelle et Évolutive à l’Université de Liège, et spécialiste du chant des poissons. Selon lui, les vessies natatoires ne seraient pas des structures résonantes comme nous le présumions : leur vibration est tributaire des muscles qui les excitent. Il insiste sur la diversité des morphologies existantes : il existe en réalité plusieurs systèmes de stimulation vibratoire (cit. “Certains Ophidiiformes par exemple ont des vessies partiellement ossifiées, et l’os peut entrer en vibration. J’avais aussi décrit un poisson Carapus […] où la vessie entrerait en vibration suite à une contraction à 10 Hz. Dans ce cas-ci, la vessie est intimement liée à une côte qui est élargie et nous supposons que c’est cette côte qui entre en vibration…“). Cela nous conforte dans l’idée de bien comprendre la morphologie / l’anatomie des poissons, et donc de lui rendre visite à Liège pour échanger plus en détails.

2018.02.05 – Optimisation du système de mesure

Présentation du projet auprès de l’équipe du Liphy

Nous présentons nos démarches artistiques respectives ainsi que le projet de chant des poissons aux autres membres du laboratoire. Les chercheurs comprennent mieux les sons étranges que nous produisons parfois.

Une vessie avec vibreur intégré

Lia élabore une vessie à double paroi à partir de gants de laboratoire. Cela permet d’y glisser le mini-vibreur de téléphone qui s’y trouve maintenu à l’abri de l’eau et sous pression.

Mesure de l’impédance des vibreurs en vue d’établir l’impédance moyenne

Pour reproduire un muscle sonique qui met en vibration une longue zone de la vessie, Térence imagine installer de nombreux vibreurs de téléphone en ligne pour créer une grande zone de mise en vibration. Pour cela, il faut câbler en série et en parallèle les vibreurs pour obtenir une impédance contrôlée vis-à-vis de l’amplificateur de puissance. L’impédance moyenne mesurée est de 14,6 ohms.

Le contact vibreur/membrane

Pour le moment, le contact entre le vibreur et la membrane se semble pas optimal : le vibreur est seulement posé sur la membrane et s’en désolidarise lors de la vibration. Nous ajoutons un silicone non durcissant entre ces deux éléments et au niveau du contact membrane/micro pour assurer leur cohésion.

 

Nous réalisons alors des tests de vibration :

  • Le vibreur sous eau avec silicone et avec la vessie ballon “double gant” – ramps from 50Hz to 150Hz

  • Le vibrateur directement sur capteur avec silicone- ramps from 50Hz to 150Hz

Conclusion : même sans la présence du gant, des parasites subsistent.

Un court-circuit

Pourtant cette vessie artificielle ne semble pas totalement hermétique et de fines particules d’eau s’infiltrent tout de même entre les deux parois. Au bout de quelques heures un court-circuit se crée et grille le vibreur. Nous mettons aussi en panne l’amplificateur qui était non-protégé!

Il faudra donc veiller à utiliser des amplificateurs protégés contre les courts-circuits, et faire attention la manipulation sous l’eau.

Nous réalisons un nouveau vibreur en recouvrant de vernis les connecteurs, puis en piégeant l’ensemble dans du silicone durcissant.

2018.02.06 – Retour aux sources

Relecture des publications

Après une petite discussion collective autour du projet, nous constatons qu’il est encore difficile d’imaginer des expériences scientifiques capables de faire avancer le projet, sans maitriser les aspects plus techniques de notre sujet. Nous  passons donc la matinée à relire les publications collectées jusqu’ici afin de mieux comprendre les mécanismes impliqués dans la production des sons.

On retiendra que :

  • La vessie est un organe relativement peu efficace pour la production des sons, dans la mesure où son anatomie semble atténuer/absorber les sons plutôt que d’amplifier le signal (Fine,  2012) 
  • Malgré la description anatomique de la vessie natatoire, il est difficile pour nous d’appréhender un matériau que nous n’avons pas encore vu, touché, expérimenté. 

Le pisciculteur du Vercors

Malgré nos allers et venues matinales entre les différentes poissonneries de Grenoble ( Halles Sainte-Claire, marché du cours Jean-Jaurès, la poissonnerie des dauphins), nous n’avons pas encore réussi à nous fournir en vessies natatoires : la plupart des poissonniers reçoivent leurs produits vidés et, malgré nos demandes, nous ne parvenons pas à obtenir ni viscères, ni poisson entier.

Nous décidons donc d’aller chercher le poisson à la source, chez un pisciculteur de la région. Autour de Grenoble il y a hélas peu de poisson, excepté la truite qui, fort heureusement,  possède en théorie une vessie natatoire.

Nous cheminerons jusqu’à la ferme “les truites de Vernaison” (Echevis) pour acheter 5 beaux spécimens au producteur.

Truite de pisciculture de la Vernaison dans le Vercos

2018.02.07 – Quand les poissons chantent

Lucia et les sons marins

La matin nous rencontrons Lucia Di Orio, co-titulaire de la chaire CHORUS. La chercheuse nous fait découvrir ses travaux  sur l’observation par le son des écosystèmes marins. Celle-ci a notamment travaillé avec Éric Parmentier, précédemment cité dans ce blog. Nous écoutons une série d’enregistrements de chants de poissons, réalisés en Sardaigne et constatons la variabilité des sons produits par le mérou, l’ophidion et le “kwa”, ce poisson non encore identifié qui obsède Lucia… Dans les paysages sonores sous-marins enregistrés par l’équipe, beaucoup de sons restent en effet encore inconnus : seules quelques espèces ont pu être répertoriées et il reste encore un travail considérable d’identification des sons produits dans la mer. Nous avons aussi eu le plaisir d’entendre d’autres sons produits les araignées de mer, les oursins, la langouste ou encore la crevette claqueuse ! Selon la chercheuse, chaque espèce marine communique dans sa propre bande de fréquence, ce qui permet de pouvoir filtrer le signal pour ne conserver le son que d’une seule espèce. 

Des premières questions collectives ont pu être posées : pourrait-on imaginer une corrélation entre le chant des poissons et le chant humain ? Des outils croisés pourraient-ils être ainsi utilisés pour la caractérisation de ces sons ? Les propriétés bio-physiques de ces organes producteurs de sons pourraient-ils être modélisés ? Si nous parvenons à produire des vessies bio-mimétiques, il pourrait être intéressant de les réintroduire dans le milieu naturel des poissons pour étudier leurs modes de communication.

Dissection et observation d’une vessie natatoire de truite

Nous débutons la dissection des truites achetées dans le Vercors la veille, afin de récupérer leurs vessies natatoires pour pouvoir les observer. 

Un scalpel est utilisé pour ouvrir le poisson sur toute sa longueur. Lia s’inspire d’une vidéo sur la dissection d’un gardon et immerge le poisson pour que les organes se détachent naturellement les uns des autres. 

Le système digestif est tout de suite visible sous la chair ; en le soulevant nous pouvons observer une fine membrane remplie d’air. Chez ce poisson, la vessie natatoire s’étend sur quasiment toute la longueur de la colonne vertébrale et en est solidaire.

Si la vessie remplie d’air est bien identifiable, il est difficile de savoir où est placé le muscle sonique : d’après Lucia  il serait placé entre la vessie et la colonne et il s’agirait donc de la masse violacée et vascularisée que l’on observe sur la photo ci-dessus ; mais d’après ce que nous avons pu lire sur l’anatomie du poisson, il s’agirait plutôt des reins. Nous n’avons pas manqué de remarquer aussi deux éléments à la texture striée qui semblent solidaires de la vessie. Sur la photo, il s’agit des deux sortes de “tendons” rosés qui s’amincissent sur la fin pour rejoindre l’autre extrémité de la vessie. Si l’organe violacé a une texture molle et se désagrège facilement, les deux “tendons” sont plus résistants et s’approchent donc plus d’une texture musculaire. Il sera nécessaire de demander l’aide d’un spécialiste sur ce point.

Nous parvenons à détacher délicatement la vessie natatoire de la colonne vertébrale pour pouvoir l’observer.

La membrane semble se vider d’air à la moindre manipulation; le tissu est extrêmement fin, fragile, relativement transparent, et visiblement vascularisé. Sa texture s’apparente à du boyau et la matière est extrêmement glissante. En manipulant la vessie dans le sens de la longueur et de la largeur, la poche semble plus résistante qu’il n’y parait et il nous a semblé intéressant de mesurer son élasticité 

Pour ce faire, nous mesurons sa longueur au repos (140 mm env.), sa largeur au repos (12,4 mm env.) et l’épaisseur de sa paroi  (40 microns env.)

Mesure de l’élasticité de la membrane ( Module de Young)

L’élasticité de la membrane de la vessie natatoire peut se mesurer par un essai de traction. Pour cela, on suspend la vessie par un poids. L’allongement élastique de la vessie est proportionnel au poids.

On en déduit le module élastique de la membrane, dit module de Young  par la formule mathématique suivante:

E=σ/ε

avec σ la contrainte développée par le poids sur la section de la membrane et ε l’allongement relatif (en pourcents).

La contrainte est égale à σ=F/S, avec F=mg le poids et S=2ew la section qui supporte ce poids, e étant l’épaisseur de la membrane (40 microns) et w étant la largeur.

On trouve une valeur de E=5x 10^6 Pa. Par comparaison le module élastique du caoutchouc d’un ballon de baudruche est 5 fois plus faible.

 

Mesures effectuée sur le ballon de baudruche au repos et étiré par un poids, puis mesure d’élasticité d’une vessie natatoire de truite
Mise en équation par Philippe

2018.02.08 – Discussions

Nous discutons avec les autres membre du laboratoire sur la suite des tests à mener. On nous conseille d’aller explorer :

– test de fluage : test non cyclique d’évolution de la déformation du matériau, pour connaitre la viscosité ou non.
– Dynamic Mechanical Analysis : frapper un matériau et analyser le déphasage / délai entre l’impact et la réaction du matériau, en fonction de sa viscosité.

2018.02.09 – Experimenta

Nous prenons la journée pour aller jeter un coup d’oeil au salon Experimenta qui se déroule cette semaine sur le site de Minatech.

Nous assistons à une conférence sur les projets Arts/Sciences qui réunit Eliane Sausse (Directrice de l’Atelier Arts Sciences), Christophe Martinez (Chercheur au Laboratoire de Visualisation) et Joris Mathieu (Metteur en scène et directeur du Théâtre Nouvelle Génération). Nous aurons l’occasion de discuter avec Eliane Sausse de notre projet et de prévoir un rdv lors de notre prochaine venue sur Grenoble.

L’après-midi, nous visitons l’exposition et discutons avec les artistes et médiateurs.